
Le nombre de condamnations visant des youtubeurs et autres influenceurs des réseaux sociaux a considérablement augmenté ces dernières années, notamment au Maghreb, à mesure que les autorités cherchent à réguler le contenu en ligne jugé nuisible ou menaçant pour l’ordre public. Les gouvernements de la région ont intensifié leur surveillance des plateformes numériques, et plusieurs jeunes créateurs ont été arrêtés pour des accusations allant de la diffamation à des actes jugés subversifs. Dans ce climat de tension, le cas de Jerando, un youtubeur installé au Canada, est un exemple frappant de la manière dont les autorités abordent la question du chantage numérique et de l’usage des réseaux sociaux pour manipuler l’opinion publique.
Une affaire de chantage numérique et de manipulation sur les réseaux sociaux
Le procès qui a abouti à la condamnation de Jerando à 15 ans de prison a révélé une affaire complexe de manipulation et de chantage. Tout a commencé début mars avec la plainte d’une femme qui affirmait avoir été victime de menaces et de pressions sur WhatsApp. Les accusations contre Jerando se sont rapidement amplifiées, et une enquête de la Brigade Nationale de la Police Judiciaire (BNPJ) a été ouverte. L’enquête a conduit à l’arrestation de plusieurs proches du youtubeur, dont sa sœur et sa nièce à Casablanca, qui ont été libérées sous conditions le 10 mars 2025.
Selon les autorités, ces membres de la famille de Jerando auraient aidé à la commission des actes criminels en fournissant des outils numériques et en participant à la création de vidéos diffamatoires. L’objectif de ces vidéos était de nuire à la réputation de certaines personnes en ligne, un acte qui a été interprété par les autorités comme une tentative de déstabilisation à plus grande échelle.
Des accusations graves : une bande terroriste virtuelle ?
Ce qui aurait pu commencer comme une simple affaire de chantage s’est rapidement transformé en un dossier judiciaire plus complexe. Jerando, selon les informations de The Voice, est accusé d’avoir formé une « bande terroriste » dans le but de semer le chaos sur les réseaux sociaux. L’idée sous-jacente de ces accusations est que les campagnes de diffamation et de manipulation en ligne peuvent être perçues comme une forme de guerre virtuelle, visant à perturber l’ordre social et à inciter à la violence, une menace qui dépasse de loin la simple attaque personnelle.
Les autorités marocaines ont jugé que ces actes s’inscrivaient dans une dynamique de terrorisme numérique. La manipulation de l’opinion publique et l’intimidation via les plateformes sociales, selon eux, sont devenues des instruments potentiellement aussi dangereux que d’autres formes de violence. Le procureur général, Najim Bensami, anciennement à la Cour d’appel de Casablanca, a déposé une plainte dans cette affaire, soulignant la gravité de ce genre de pratique qui mine la stabilité de la société.
L’impact des condamnations sur les créateurs de contenu
Ce verdict soulève une question plus large : quel rôle jouent les créateurs de contenu dans la société numérique moderne ? D’un côté, les plateformes comme YouTube ont permis à de nombreuses personnes de gagner en visibilité et d’exprimer librement leurs opinions. De l’autre, elles sont devenues des terrains propices à la diffusion de contenus nuisibles, qu’il s’agisse de fake news, de harcèlement ou de manipulation. Ce phénomène est devenu particulièrement évident dans des régions comme le Maghreb, où la régulation d’Internet reste un enjeu majeur.
L’affaire Jerando n’est pas isolée, et elle s’ajoute à une série de condamnations qui se sont multipliées ces dernières années. Dans un contexte de surveillance accrue et de réglementation de plus en plus stricte des contenus en ligne, plusieurs influenceurs et youtubeurs ont été condamnés pour des raisons similaires. Les autorités semblent vouloir envoyer un message clair : la liberté d’expression sur les réseaux sociaux n’est pas absolue et peut être restreinte lorsque des actes de manipulation ou de menace en ligne sont constatés.
La montée de la régulation des réseaux sociaux
L’histoire de Jerando souligne les défis auxquels sont confrontés les créateurs de contenu dans un monde numérique où les frontières entre la liberté d’expression et la sécurité publique sont floues. Les condamnations comme celle-ci rappellent que les plateformes numériques, loin d’être des espaces déconnectés de la réalité, sont désormais des éléments clés de la dynamique sociale et politique. À mesure que les gouvernements intensifient leurs efforts pour réguler le contenu en ligne, il est probable que de telles affaires deviendront de plus en plus fréquentes. Le défi sera de trouver un équilibre entre la liberté de créer et la nécessité de maintenir un environnement numérique sain et sécurisé.