
L’Institut des Artisans de Justice et de Paix (IAJP/Co) a organisé, le jeudi 15 mai 2025 à Cotonou, une conférence-débat sur le thème : « L’impératif de la bonne gouvernance pour relever les défis actuels liés à la précarité exponentielle ». L’initiative s’inscrit dans une série de réflexions menées par l’institut pour susciter un dialogue citoyen sur les enjeux socioéconomiques du pays. Trois intervenants ont partagé leurs lectures du sujet : Jacques Ayadji, président du parti Moele-Bénin ; Jude Lodjou, ancien député et membre du parti Les Démocrates ; et Ralmeg Gandaho, juriste spécialisé en gouvernance publique et droits humains.
En ouverture, le directeur de l’institut, le Père Arnaud Éric Aguénounon, a rappelé le lien entre ce thème et les réalités constatées sur le terrain. À travers ses missions dans plus de 200 établissements scolaires catholiques du pays, l’IAJP/Co affirme observer une précarité multiforme dans plusieurs localités. Cette situation, selon lui, appelle à une introspection collective sur la manière de gouverner et de gérer les priorités nationales.
Prenant la parole, Jacques Ayadji a questionné le cadrage du sujet. Il a notamment remis en cause le thème. Pour lui, l’expression « impératif de la bonne gouvernance » doit d’abord clarifier ses destinataires. Il a interrogé la place des citoyens dans cette dynamique : « À qui s’adresse cet appel ? Aux institutions ? À la société civile ? ». Selon lui, une lecture univoque du concept de « précarité » peut occulter les formes de résilience vécues par certaines couches sociales. « Le thème pose problème parce que ce thème annonce de façon péremptoire un défi, c’est-à-dire présente la précarité comme une mauvaise chose à laquelle il faut trouver une réponse. Et la réponse, selon le concepteur du thème, c’est la bonne gouvernance », indique-t-il tout en indiquant que « la précarité n’est pas une mauvaise chose ».
Jude Lodjou, de son côté, s’est évertué à noter que le thème n’a aucun problème. Il a illustré la précarité à travers l’exode rural et l’inadéquation entre la formation universitaire et l’accès à l’emploi. Il a évoqué les jeunes diplômés confrontés à l’incertitude et souligné que la gouvernance devrait produire des réponses concrètes à ces impasses. Pour lui, il est nécessaire d’engager des politiques publiques capables de réduire les inégalités et d’améliorer les conditions de vie, notamment dans les zones rurales.
Ralmeg Gandaho a élargi la discussion au cadre juridique et institutionnel. Il a relevé les écarts entre les textes de loi et leur mise en œuvre sur le terrain. Selon lui, les missions de suivi des droits humains révèlent des réalités qui contredisent les engagements pris par l’État. Il appelle à un renforcement du contrôle citoyen, du plaidoyer et de l’éducation aux droits fondamentaux pour restaurer la confiance et réduire les écarts de gouvernance.
Le public a également contribué aux échanges. Un participant, Paul Houessou, a mis en lumière ce qu’il considère comme une tendance à complexifier les concepts, au point de rendre floues les responsabilités et les attentes citoyennes. Il s’est interrogé sur la manière dont les termes comme « précarité » et « gouvernance » sont utilisés dans le discours politique et surtout par certains membres du régime en place. « Y a-t-il dans le régime qui nous dirige aujourd’hui un moulin à fabrication de concepts qui fait que les concepts que nous connaissons là quand on vient s’asseoir devant vous, on se perd ? », s’est-il interrogé.
Cette conférence fait suite à une autre rencontre tenue le 10 avril 2025, avec l’intervention du professeur Joseph Djogbénou, président de l’Union Progressiste le Renouveau (UPR), sur le thème : « L’impératif de la bonne gouvernance pour relever les défis actuels ». L’IAJP/Co entend ainsi maintenir un espace de dialogue ouvert aux acteurs politiques, juridiques et sociaux autour des défis actuels du pays.