Mer de Chine : la bataille silencieuse entre Pékin et Manille relancée

Par lanouvelletribune  -  11 septembre 2025 10:00

Image placeholder

Depuis plus d’une décennie, les relations entre Manille et Pékin sont marquées par des tensions croissantes autour de la mer de Chine méridionale. Cette vaste zone maritime, traversée par une grande partie du commerce mondial, abrite de nombreuses îles, récifs et ressources stratégiques que plusieurs pays se disputent. En 2016, la Cour permanente d’arbitrage avait donné raison aux Philippines en invalidant les revendications chinoises sur la quasi-totalité de cette mer. Pékin, cependant, a toujours refusé de reconnaître cette décision et continue d’affirmer sa souveraineté sur la plupart des îlots, y compris le récif de Scarborough, situé à seulement 220 kilomètres des côtes philippines. C’est dans ce climat déjà tendu qu’un nouvel épisode vient raviver les frictions.

Une réserve marine qui attise la colère de Manille

Mercredi, la Chine a annoncé la création d’une réserve naturelle d’environ 3 500 hectares autour du récif de Scarborough, qu’elle désigne sous le nom d’« île de Huangyan ». Selon Pékin, ce projet vise à préserver la biodiversité et à protéger l’équilibre écologique de la zone. Officiellement, il s’agirait d’une démarche environnementale, mais pour Manille, il s’agit avant tout d’une manœuvre politique destinée à renforcer les revendications territoriales chinoises.

Jeudi, la diplomatie philippine a vivement réagi en qualifiant cette décision d’« illégitime » et « illégale ». Pour le gouvernement de Ferdinand Marcos Jr., le récif appartient sans ambiguïté aux Philippines et la création d’une réserve par la Chine constitue une violation de leur souveraineté. Cette confrontation n’est pas seulement symbolique : Scarborough est une zone de pêche cruciale pour des milliers de familles philippines et revêt une importance stratégique majeure pour la surveillance des routes maritimes régionales.

Publicité

Une bataille juridique et géopolitique sans issue rapide

L’affaire illustre la complexité des disputes en mer de Chine méridionale. Pékin revendique toujours une « souveraineté historique » sur la quasi-totalité des îles et récifs, ignorant la décision de la cour d’arbitrage internationale de 2016. Les Philippines, appuyées par ce jugement, tentent de s’appuyer sur le droit international pour protéger leurs intérêts, mais leurs moyens militaires et diplomatiques restent limités face à la puissance chinoise.

En pratique, chaque nouveau projet chinois — qu’il s’agisse de construire des infrastructures, d’envoyer des garde-côtes ou de déclarer une réserve écologique — contribue à modifier progressivement les faits sur le terrain. Pour les experts, cette « stratégie des petits pas » permet à Pékin d’imposer son autorité sans recourir à une confrontation directe. Les Philippines se retrouvent alors devant un dilemme : protester avec force ou risquer de voir leurs droits s’effriter au fil du temps.

Au-delà des enjeux territoriaux, l’affaire de Scarborough touche aussi à l’équilibre des alliances régionales. Les États-Unis, alliés historiques de Manille, surveillent de près la situation. Une escalade pourrait transformer cette dispute locale en point de friction majeur entre Washington et Pékin. Dans un contexte où plus de 60 % du commerce maritime mondial transite par ces eaux, l’impact dépasse largement les frontières des deux pays.