
Depuis plus de soixante-dix ans, le pouvoir à Pyongyang circule de père en fils, transformant ce qui se voulait un État socialiste en une véritable dynastie. Kim Il-Sung, héros fondateur, a cédé sa place à son fils Kim Jong-Il, puis à Kim Jong-Un, actuel maître du pays. Cette continuité familiale, qui tranche avec les pratiques d’autres régimes autoritaires, a installé l’idée que la Corée du Nord fonctionne comme une monarchie moderne camouflée derrière un discours révolutionnaire.
Une adolescente projetée sur le devant de la scène
Selon Reuters, les parlementaires sud-coréens rapportent que les services de renseignement estiment que Kim Ju Ae est désormais présentée comme la figure appelée à prendre la relève de son père. Son apparition récente en Chine, aux côtés de Kim Jong-Un lors d’une rencontre avec les chefs d’État russe et chinois, est interprétée comme une étape soigneusement orchestrée pour habituer l’opinion à son rôle futur. Dans un système où l’image officielle fait office de message politique, chaque sortie publique de l’adolescente est perçue comme une pièce de ce scénario de succession.
Certains observateurs rappellent qu’un fils aîné du dirigeant aurait grandi à l’abri des regards, mais qu’il aurait été écarté du cercle du pouvoir, laissant à Ju Ae le champ libre. En étant exposée à la fois aux élites du pays et à la scène internationale, elle semble endosser peu à peu le costume d’héritière.
Pyongyang prépare déjà la relève
Séoul estime que cette désignation implicite marque une volonté claire de prolonger la lignée des Kim sans interruption. Présenter Ju Ae au monde équivaut à une annonce anticipée : la transition ne se fera pas dans l’ombre, mais par une mise en scène progressive. On peut comparer cela aux dynasties royales européennes, où l’on montrait tôt le dauphin au peuple afin de prévenir toute contestation.
Ce choix pourrait aussi être une manière de verrouiller les ambitions de potentiels rivaux au sein de l’appareil d’État et de l’armée. Plus la jeune fille est mise en avant, plus l’idée de sa légitimité s’impose, réduisant les marges de manœuvre des factions internes.