
Au-delà des tensions diplomatiques et juridiques, l’uranium nigérien garde un attrait irrésistible. Depuis des décennies, ce minerai stratégique attire les grandes puissances comme des collectionneurs se disputant une pièce rare. Les difficultés relationnelles entre Niamey et Orano n’ont en rien réduit l’intérêt mondial pour ces gisements, bien au contraire. Dans un contexte où l’énergie nucléaire reprend de l’importance comme alternative aux énergies fossiles, de nombreux investisseurs étrangers sont prêts à débourser des sommes considérables pour obtenir un accès à ce métal lourd qui pèse dans l’équilibre énergétique international.
Une ressource stratégique paralysée par les litiges
La SOMAIR, seule mine d’uranium encore en activité au Niger, détient actuellement près de 1 500 tonnes du minerai déjà extraites mais stockées sur son site. Ces cargaisons, qui auraient pu rapidement trouver preneurs, restent bloquées à cause d’un bras de fer judiciaire. Le Centre International pour le Règlement des Différends relatifs aux Investissements, saisi par Orano, a interdit à l’État nigérien de vendre ou transférer ce stock. Cette décision prive momentanément Niamey d’une manne financière précieuse, alors que le marché montre une forte demande.
La nationalisation de la SOMAIR en juin dernier, qui a placé la société sous le contrôle de la Sopamin, a rebattu les cartes. Orano, ancien actionnaire majoritaire, s’est retrouvé écarté de l’exploitation opérationnelle et conteste ce changement devant la juridiction internationale. Le verdict provisoire, qui empêche la commercialisation, agit comme un verrou posé sur une chambre forte pleine à craquer.
Les acheteurs frappent à la porte
La rareté mondiale de l’uranium renforce l’appétit des pays qui cherchent à sécuriser leur approvisionnement. Plusieurs acteurs internationaux – de l’Iran à la Russie en passant par la Turquie – seraient déjà en position pour négocier. Chacun y voit un atout géopolitique majeur : disposer de l’uranium, c’est garantir une carte énergétique stratégique et, pour certains, une influence diplomatique accrue.
L’enjeu pour le Niger est donc double. D’une part, protéger ses intérêts face à un partenaire historique devenu adversaire dans les tribunaux. D’autre part, s’assurer que l’exploitation de cette ressource lui rapporte davantage que dans le passé, où les critiques dénonçaient une répartition jugée inéquitable des bénéfices. L’uranium nigérien se retrouve ainsi au cœur d’un jeu d’équilibriste : entre les pressions juridiques internationales, la soif d’indépendance économique et la convoitise d’acheteurs étrangers.
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